• Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !Comme je le disais dans mon article précédent (« Au pays des khmers d'ISAN (1).), notre virée aux abords des terres cambodgiennes, dans la province de Surin, ne nous aura pas permis de faire notre balade à dos d'éléphant, ni de visiter un temple de la grande époque Khmer mais nous allions, grâce à la passion de notre hôte, passer une partie de la journée au milieu des coqs de combat et de leurs propriétaires.

    [...]

    Après un réveil plutôt douloureux, en effet la veille, jour de notre arrivée, un autre fan de ces gallinacées d'exception nous rejoignait. Je me disais alors, à les entendre parler avec engouement des coqs voués au combat que ce n'était pas seulement un passe temps mais une vraie passion...Que je te parle de lignée, de reproduction, de préparation, d’entraînement, de la possibilité et la façon d'envoyer des œufs fécondés jusqu'en Europe, ils me montraient aussi fièrement des photos issus de magazines spécialisés où ils avaient l'honneur de poser avec des champions hors catégories cotant des millions de baths ainsi qu'avec des thaïs dont la renommée dépassait largement les frontières du pays du sourire...Toute cette soirée à les écouter ne pouvait que mettre en exergue ma curiosité, et le lendemain, j'allais enfin découvrir, in vivo, ce qu'était ce milieu des combats de coqs...

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !Nous partions avec deux coqs mais aussi tout le matériel qui va avec, car ne croyez pas que l'on prend son coq sous le bras comme on emmènerait un vulgaire poulet se promener (d'ailleurs, je ne sais pas si l'on emmène vraiment des poulets se promener?). Il faut les choyer, ne pas trop les bousculer pour le transport, ne pas oublier tout ce qui va servir pour le combat, plumes de rajouts, eau propre pour le massage, petit matériel de chirurgie, en cas où, et toutes sortes matériels dont je me demandais à quoi cela pouvait bien servir !

     

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

     

    Nous n'allions pas bien loin, en « banlieue » de Prasat, à une petite dizaine de kilomètres de notre lieu de villégiature. Cela me permit de voir un peu mieux la campagne environnante, vu que je n'étais que copilote, elle ressemblait aux paysages que m'offrent tous les jours les rizières de Ban Pangkhan, du vert et encore du vert à perte de vue ! Les villages que l'on traversait ressemblait au village de « mon ISAN »avec peut-être quelques exceptions :

    De nombreuses grosses maisons, imposantes et claquantes, surgissaient de n'importe où, me faisant remarquer que les maisons des fermiers du coin étaient, par contre, pour la plupart faites de bric et de broc et de petites tailles ; du coté de Pangkhan, les paysans semblaient plus riches, vivant dans un certain confort et un espace plus large tout relatif ! La réputation (« la mauvaise réputation »?) comme quoi les filles de la région étaient les plus nombreuses du pays du sourire à aller à la pêche aux farangs (« tok farang ») se confirmait-elle ? Dans les moindres villages, des farangs par ci, des farangs par là, cela ne manquait pas, du moins, même si nombreux n'étaient pas là ou plus là, ils avaient largement contribué à l'édification de ces baraques...Certains me diront, « non, non, les maisons « tape à l’œil » appartiennent pour la plupart aux nouveaux riches thaïs », certes, c'est sûrement vrai en parti, mais il n'empêche que pour taille égale de villages et de petites villes par rapport aux alentours de Sélaphum, le farang y est légion ! Pour clore le chapitre, lors d'une autre vie, je me souvenais bien, qu'une grande majorité des filles de bar que je rencontrais, étaient issues de cet arc Buriram-Surin-Sisaket, même si, pour ne pas en vexer certains, il y a toujours des exceptions pour confirmer les règles...Non ? (Et puis par chez moi, nous avons de grandes « pêcheries », aussi ! Décidément, les spécialistes ne manquent pas !).

    Une dernière chose que je remarquais, sont aussi les maisons des esprits qui sont imposantes et en grands nombres pour un même terrain, quelques soient, du coup, la grandeur des maisons, bicoques ou châteaux ! Serait-ce que les « Phis » seraient plus virulents et nombreux du coté Surin qu'à Roï-Et ? Y aurait-il plus de magie noire du coté des khmers d'ISAN ou des khmers tout court ? Cela me fait sourire, car si l'on écoute Rok Sadet, groupe de rock-kantrum ( le molam sing est appelé Kantrum du coté de Surin) emblématique de la région de Surin, il semblerait que fantômes et gri-gri soient vraiment partout à chaque coin de maisons !

    D'ailleurs, une petite anecdote me vient à l'esprit, je rencontrais, il y a quelques années, une fille de Surin et je lui disais que j’habitais à Roï-Et, elle me dît alors : « Fais gaffe, par là bas, ce sont les rois de l’envoûtement ! » et lorsque je parlais à ma femme de Surin, bla bla bla, elle me disait (elle me le dit encore aujourd'hui) de me méfier des filles du coin, du quartier de Surin, qu'elles étaient les reines de la magie noire ! Comme quoi... Il n'empêche que la région semblait être prête à repousser une invasion massive des esprits...

     

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

    Après cette parenthèse dont les propos n'engagent que moi, nous arrivions aux abords de Prasat, près d'une retenue d'eau, un appentis plutôt brinquebalant nous attendait ; cette arène dédiée aux combats de coqs siégeait près d'une très belle et imposante maison en bois de teck brillant de son vernis fraîchement peint, elle s’avérerait appartenir à un policier qui s'occupera du bon déroulement des futurs affrontements !

    À peine sortis du pick-up, que nous mettions « nos coqs » sous cloche, d'autres étaient déjà là et encore d'autres arriveraient durant les deux heures qui suivirent ! C'était un rendez-vous habituel des samedis matins, une petite ère de combat, où l'on venait tester ses coqs, les paris engagés par les propriétaires sur leur « poulain » devaient être raisonnables, le nombre de rounds ne devant pas dépasser, trois. Lors de « grand combats » les coqs peuvent se battre sur dix, voire vingt rounds de vingt minutes et les sommes engagés par les propriétaires peuvent alors atteindre des sommets, elles se comptent en centaines de milliers de baths...Ici trois cents, au plus mille baths semblaient être la norme.

    Sous l'appentis, des hamacs et des tables-sièges faites de bambous étaient là pour accueillir le public et les staffs respectifs à chaque coq. Derrière le ring, un petit restaurant proposait soupes et petits en-cas confectionnés par la femme du flic. De l'autre coté de la rue, juste en face du « stadium », une échoppe tenue par un sino-thaï (peut-être le frère du flic, sûrement de la famille) serait là pour abreuver les gosiers des spectateurs qui se seront égosillés à encourager leurs favoris !

    Tout était en place, parfaitement organisé, cela commençait à discuter sec. Les coqs, bien au milieu de tous, chantaient à tour de rôle, et les propriétaires se levaient par instant, venant voir les coqs des futurs adversaires, demandant des précisions, sur l'age, le poids (même une balance fut sortie pour confirmer le juger de chacun), les négociations, les exagérations de certains misent à mal par la connaissance de chacun, mais c'est de bonne guerre faire de l'intox lors des avant-combats, qu'ils soient de coqs ou de boxes ! Forcément, la venue de farangs avec leurs coqs de race birmane, a fait que de nombreux aficionados arrivèrent pour voir ce que leurs coqs de race thaïe ou de type Saïgon valaient ! (et il y en a encore d'autres des races de coqs de combats à ce qu'il paraît). Le temps des négociations étaient engagés, deux rounds ou trois, combien, refus par trop de différence de poids ou du manque d'expérience de certains coqs (c'était le cas des deux nôtres), puis on revenait et on renégociait, tantôt cela parlait en thaï, même en lao et puis si l'on voulait que l'on ne comprenne pas vraiment, on s'exprimait en suay, la langue du quartier, sorte de mélange de khmer et lao, et certains s'exprimaient même en khmer pour être sur que certains (nous) ne comprennent pas...Après deux heures de palabres, plusieurs combats furent arrangés et je commençais à être soulagé, la chaleur humide devenant pesante et suffocante en ces temps de mousson...

     

    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

     

    Le premier combat engagea notre coq birman sans queue (cela faisait rire les autres) à un coq thaï, sensiblement du même poids, mais qui fut compensé de toute façon par des bandelettes d'épaisseur variable autour des ergots sur le coq le plus lourd. Le pari fut de mille baths pour deux rounds de vingt minutes, l'organisateur encaissant mille cent baths et quelque soit le résultat, gardant pour lui cent baths.

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    Au pays des khmers d'ISAN (2). Les coqs de combat !

     

    Les deux coqs furent alors pris en charge par des soigneurs, choisis par les propriétaires respectifs. Massage, humidification du plumage, rajout de plumes sur les ailes, gavage léger de sucres lents, bananes et boulettes de riz, on les fait boire aussi, quelques vitamines, bichonnages, on se serait presque cru à l'avant match de boxe d'un championnat du monde WBA !

    Le combat pouvait commencer...

     

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    Entre les deux rounds, petites chigurgies...

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    Pour récupérer, on lui fait respirer des feuilles de curcuma broyé !

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    Tous s’installèrent autour du ring et si au début l'ambiance fut plutôt calme, dès l'attaque fracassante d'un des deux belligérants, les cris jaillirent, encourageant ou dénigrant l'un des deux coqs. Un autre gars, ami de l'organisateur (un autre flic sûrement) tenait un carnet dans ses mains et enregistrait les paris qui se faisaient entre deux spectateurs, les coqs s'observèrent, haletant pour récupérer entre chaque attaque, puis le coup de gong, qui est ici un gros bambou évidé sur lequel on tape à l'aide d'une verge sèche, marqua la fin du premier round . Les deux coqs repartirent sous le bras de leur préparateur respectif , chacun dans leur camps. Alors commença, massage et nettoyage intensif, gavage, petite chirurgie si nécessaire, surtout celle des paupières des yeux, endroits ou le bec acéré de chaque coq vient taper régulièrement sur l’œil de l'autre. Vingt minutes de pause avant le second round, c'est court, pendant ce temps, un autre combat s'engage et ce sera ainsi de suite jusqu'au dernier engagement ! Des entraîneurs de bonne renommée viennent observer, voire aider, donner des conseils aux soigneurs, ils seront aussi présent pour repérer de futurs grands coqs de combats qu'ils pourront proposer d’entraîner, voire de l'acheter pour de futures grands combats aux enjeux pharaoniques...

    Deuxième round !

     

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    La fin du combat en vidéo :


     

    Les vingt minutes passèrent très vites et le second round pût débuter... Et il se finit par match nul... Pour qu'un coq soit déclaré perdant, il doit, soit s'échapper du ring de peur de l'autre, ou bien mourir mais ce qui est rare à ce qu'il parait... Notre second coq fera aussi match nul, l'organisateur rendra l'argent à chaque propriétaire qui lui aura alors laissé sa part de cent baths, il faudra donner cent baths par coq au soigneur, qui après deux rounds aura de la micro chirurgie à faire, ergots et doigts abîmés, crête décollées, œil tuméfié... Il était temps de rentrer bichonner les combattants et les mettre au repos bien mérité !

    J'avais déjà assisté à des combats de coqs, il y en a aussi dans les villages alentours de Pangkhan, même au village des fois, mais ce coup-ci, j'avais compris les règles et participé du début à la fin d'une journée de combat, percevant des détails, des coutumes que je n'avais jamais remarqué, n'étant pas vraiment intéressé par ces luttes animales que je pensais d'un autre temps mais depuis cette belle journée, j'ai surtout compris ce qui fait que ces combats de coqs soient une réelle passion pour certains ou un rejet total pour d'autres !

    Paille Kheundheu.

    PS : Voici deux vidéos, édifiantes, de combats où les paris dépassent l'entendement,

    cela se chiffre en millions de baths !

     

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  • Commentaires

    1
    Chris999
    Samedi 11 Août 2012 à 14:25

    Les coqs de combat sont bichônnés par leurs propriétaires 365 jours par an. Il me semble pas y avoir là de maltraitance de l'animal !

    Nos amis Guadeloupéens sont maîtres en la matière... La pratique est tolérée pour les Antilles françaises dont la Martinique.

    Mais qu'en est-il de l'avenir de l'East Asian Road ?

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    2
    Lundi 13 Août 2012 à 11:57

    , merci de ce commentaire, j'ai voulu être le plus honnête possible sur ce que j'avais vu et vécu ...Quant à East Asian Road, ce ne va pas être facile mais ce n'est pas impossible...J'en reviens après avoir fait  notre "éléphant tour" !

    À Bientôt !

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